… ou « comment se faire chier pendant une heure et demie ? »
Eh oui, tous le monde se souvient évidemment de la magistrale adaptation du chef-d’oeuvre de science-fiction écrit par Herbert George Wells à l’année 1898, comptant les déboires de la condition humaine face à une invasion extraterrestre génocidaire à une époque coloniale où l’idée de ne pas être seul dans l’Univers commençait à trotter dans les esprits, quelques siècles à peine après la conscience que la Terre n’était pas le centre de l’Univers.
Et pourtant, l’année même où Tom Cruise tentait de survivre à une invasion de tripodes, deux adaptations télévisuelles du même récit sont sorties, de manière logiquement inaperçue, compte tenu du fait qu’il ne s’agit pas de films, mais des campagnes de publicité pour des soins oculaires, tant le résultat surpasse tous les seuils de la nullité.
David Latt, réalisateur du non moins horrible téléfilm « Big Foot » sorti l’an passé, semble pourtant s’être refait une réputation en pondant le quelconque « Abraham Lincoln, tueur de vampires ». Or, en 2005, il nous a prouvé qu’à trop vouloir créer sur le « buzz« , on fini par produire le void
Venons-en aux faits : Latt nous a ici réalisé un film original que nous pourrons résumer ainsi : une série B, sans la série et sans le B.
Commençons par les effets spéciaux. À première vue, ils sont très bien réussis … Enfin, pour un enfant de 4 ans, voire 3 pour les inclusions de 3D qui ne sont pas sans rappeler ces moments frustrants de nos jeux en ligne préférés. Vous savez, ce moment de « lag » où votre adversaire traverse un mur en mourant ? Et bien David Latt a dû penser que c’était normal, puisqu’avec des méchants aliens pixelisés façon Minecraft, on a tendance à se dire que le monde va mal. Est-ce ce qu’aurait souhaité l’écrivain ? Le fait qu’il n’a pas connu le cinéma de masse ne justifie pas un tel assassinat.
Autre point fort du film au niveau des effets visuels : les attaques d’acides dans les yeux qui rappellent davantage un film pornographique du début des années 60 tourné avec une Super 8 qu’autre chose. Une impression qui s’accentue lorsqu’on apprend comment tuer un pré-ado en quelques secondes : secouez-le !
Sur l’ensemble, les amateurs du « Last Days » de Gus Van Sant vont reprendre leur gratte et chanter « Death to Birth« , ne serait-ce que pour la vélocité et l’énergie qui se dégage des événements, pas vue depuis la dernière saison de Vivement Dimanche. La musique rappelle un groupe de New Age dépressif, et pour le coup, l’effet est bien rendu : tristesse, tension dramatique jusqu’à la pulsion suicidaire. Dommage que le reste ne converge pas dans le même sens. Après tout, et sans sarcasme, une version de l’oeuvre de Wells accentuant le côté dramatique aurait été une bonne idée.
Certains personnages donnent du fond et de la consistance au film, comme ce scientifique qui, en réaction à une invasion extra-terrestre, fait baisser la fièvre d’un patient avec des pétales de fleur ou encore le réalisme des scènes de combat, sur lesquelles se fait instinctivement entendre la musique de « Benny Hill« .
Avant de continuer, on va juste rappeler le sujet du film : « on va tous crever », et pas « on a douze crevettes ».
Le scénario, quant à lui, parle du lui-même : résurrections inexpliquées, morve fluorescente sortie d’on ne sait où, et une remarque toute particulière pour cette scène d’un réalisme et d’un travail cinématographique extraordinaire : la terre tremble, personne ne tombe, mais un personnage trouve tout de même le moyen de dire « Oh m**de, ma main !« . Une scène aussi cohérente que si, à la question « quelle heure est-il ? », vous répondiez « Rouge ! ». Un grand moment d’art dramatique.
Pour bien enfoncer le clou, le personnage principal, George (joué par l’excellent C. Thomas Howell, qui a interprété George Foyet dans Esprit Criminels), cri sans raison (personne n’est mort). À croire qu’il a vu France-Géorgie.
Enfin : les dialogues. Le pasteur du film est un authentique artiste. Ce film a en effet pour mérite – lequel doit se sentir bien seul – de dénoncer le fanatisme religieux par des phrases qui ne sont pas sans rappeler celles de Ken Foree dans Dawn of the Dead : « Dieu les a choisis » (eh beh on n’est pas dans la m**de), « Dieu était avec nous » (après un coup de seringue dans la tronche), « Dieu m’a oublié » (pas les aliens en tout cas …), « c’est la volonté du Seigneur », « Tous ceux qui ont la foi se retrouveront » …
Bref, je m’excuse de ne pas avoir touché au fond : ce film – directement passé à la télévision, c’est dire … – , qui se veut adapté, est une telle offense à l’oeuvre originale, qu’aucune comparaison n’est possible avec l’oeuvre de Wells, lequel doit avoir bien froid dans sa tombe, tant il a du se retourner dedans en pensant à l’adaptation de Latt.
Mais ne soyons pas mauvais téléspectateurs : les publicités étaient très bien faites.
Pour terminer sur ce moment de deuil, je vous conseille de lire les commentaires sur la page IMBD du film. Un d’entre eux résume le film : « J’étais pour les aliens, pour qu’ils tuent tous ces acteurs pourris« .
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