La mort d’Ilalotha

Clark Ashton Smith en 1912

Clark Ashton Smith en 1912

La mort d’Ilalotha, paru en automne 1937 dans le célèbre Weird Tales n’aura été traduit en France qu’en 1975. L’on peut aisément en appréhender les raisons ; les récits de Clarke Ashton Smith, à l’instar de ceux de Lovecraft, étaient prégnants de ce qu’on dénonçait comme une littérature populaire (au sens péjoratif, comme toujours aurait-on envie de dire) et déviante à l’époque. Cette courte nouvelle du poète recèle néanmoins des trésors stylistiques et macabres qui n’ont rien à envier à Baudelaire ou Poe.

Car c’est ainsi qu’on pourrait définir Smith en une expression : un poète maudit, à l’image de nos poètes nationaux. Il manie et combine avec brio poésie romantique et macabre. Car c’est ainsi que se présente le style employé ; on ressent immédiatement la plume poétique de l’auteur dans la narration, notamment dans les descriptions. Celles-ci ne sont pas physiques en tant que tels, Smith use en effet des sentiments passionnés du personnage principal pour y faire transparaître la beauté saisissante de celle qui fait l’objet de la nouvelle : Ilalotha.

Recueil des "Meilleurs Récits de Weird Tales, Tome 2, années 1933-1937" paru en 1975

Recueil des « Meilleurs Récits de Weird Tales, Tome 2, période 1933-1937 » paru en 1975

L’histoire en elle-même n’est guère complexe, et quelque peu semblable à celle de Dracula de Bram Stocker, à la différence près que le Roi, fol amoureux de la défunte Ilalotha, se rend à ses sentiments pour la rejoindre à son tombeau là où la compagnie de protagonistes de Stocker tuait le Comte afin d’empêcher Mina de se transformer en vampire.

À quelques différences près, Ilalotha, ancienne amante du Roi s’est damnée afin de l’attirer à elle une ultime fois et, une fois ce dernier possédé, Smith dévoile une scène dévoilant sa carcasse desséchée, la peau sur les os, laissant fortement penser que sa bien-aimée lui suce le sang tout en prenant une apparence démoniaque.

La force de La mort d’Ilalotha réside dans deux caractéristiques qui font la force de l’écriture de Smith : le panégyrique de l’amour nécrophile ; la passion étant plus forte que l’état de la défunte et même sa caractéristique démoniaque (la Reine, en surprenant son époux dans le tombeau, l’entend encore pousser des faibles gémissements de plaisir alors qu’il est au seuil de la mort), et l’univers dépeint, indistinctement luxueux et décadent, où les plaisirs orgiaques sont égaux à la somptuosité royale pour rendre hommage à la défunte. À l’image du poème Une Charogne de Baudelaire, on se retrouve ici avec ce double langage confondant mort et attirance sexuelle, celle-là même provoquée par le cadavre au centre du récit (bien que la connotation érotique chez Baudelaire est plus subtile, forme poétique oblige).

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